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JUI 08

Coach, un vrai métier ?

Caroline m'interroge sur le métier de coach avec des questions inédites à partager :
« J'entreprends une formation de coach mais une question me taraude : le coaching, avec sa dimension narcissique et de bien-être, est-il un vrai métier ?
En effet, vous écrivez que vos clients vous apprennent beaucoup sur vous. Il y a ici un côté narcissique qui me fait peur !
Et le coach se permet de se ressourcer souvent, de rencontrer d'autres âmes du milieu, de lire…
J'ai ici une croyance et un frein : il faut de la pénibilité dans le travail pour pouvoir dire "je travaille, je gagne ma vie". Je culpabiliserai de faire un métier de bien-être alors que tout le monde "trime" ?!
Caroline »

Et des pistes de réponses, très personnelles, pour débattre…

Je vous réponds ici, Caroline, sur le mode "narcissique" : en vous parlant un peu de moi ;-)
Nous avons le métier de nos symptômes ! Et, si je fais du coaching mon métier – un métier qui est, pour moi, l'art de prendre soin de soi, de l'autre, de la relation, de la vie – c'est que mon roman personnel a d'abord pris sa source dans l'intolérance au bonheur !
J'ai longtemps navigué dans les eaux profondes où coule cette source : fuite en avant, compétition, "travailler plus pour gagner plus" (!), malade en vacances, inaptitude au plaisir… Et puis, enfin, stoppé dans ma course effrénée par une maladie auto-immune…

J'ai alors découvert que j'éprouvais des sensations, des émotions, que j'avais aussi un corps…
Et, depuis, je réapprends à vivre, à percevoir sans chercher à comprendre, ressentir sans mentaliser, savourer l'instant sans me projeter dans le futur, être présent à moi, à la vie, tranquillement, contempler mes enfants, les regarder changer et aller dans le monde... Et bien d'autres choses encore…
C'est comme être amoureux du monde, de plus en plus souvent…
Pour devenir ce que nous sommes, peut-être faut-il d'abord faire l'expérience de ce que nous ne sommes pas ?

C'est un métier exigeant pour le coach qui ne chosifie pas le client avec des outils ou
des grilles de personnalité. Exigeant car le coach est alors son propre instrument. Avec parfois des rencontres au cœur de son histoire et souvent avec l'innatendu !
Alors, vous pouvez ajouter à la liste des "permissions" du bien-être : prendre le temps de cultiver son jardin, offrir sa peau au toucher (le massage sous toutes formes !), faire du yoga, écrire…

Voici aussi, en écho à votre question, quelques lignes retrouvées chez des auteurs qui me font "travailler" :
« La loi de l'âme est radicale : si je ne suis pas proche de moi, je ne le serais de personne – et personne ne pourra impunément m'approcher ! Car l'autre reçoit aussitôt, même si je crois l'aimer, le reflet radioactif de ma haine de moi-même » Christiane Singer.

« Comment pourrions-nous guider les autres […], sans s'examiner soi-même en même temps ? Et de la même façon, comment pourrions-nous demander à un client de se centrer sur la façon dont il se relie aux autres, sans examiner notre propre mode relationnel ? Je reçois plein de feed-back et de retour de mes patients (que je retiens des choses, que je rejette, que je juge et que je suis froid et distant), mais je dois les prendre sérieusement. Je dois me demander si ça correspond à mon expérience interne et si d'autres personnes ont donné un retour similaire. Si ma conclusion, c'est que le feed-back est juste et que cela illumine mes zones aveugles, alors je me sens reconnaissant envers mes clients et je les remercie. » Irvin D. Yalom.