09
NOV 09

Conversations d'automne

Elle choisi la tarte aux fruits de saison et demande un café. Elle me dit : « J'aurais aimé être ton éditrice ! » Troublé, comme chaque fois qu'elle parle d'écriture, je détourne un instant le regard, contemple le visage de la jeune femme qui note sa commande, la chair douce et ronde de ses joues. Puis elle me raconte comment, dans sa vie d'avant, elle découvrait des auteurs, éditait des livres pour enfants. Je crois comprendre ce qui me trouble. Écrire c'est peut-être rejoindre la part d'enfance que je croyais oubliée à jamais. L'accès à la mémoire ancienne est fermé mais la musique de l'âme est toujours présente. Là, sous les doigts, entre les mots à l'encre bleue. Et c'est peut-être ça qui la touche aussi. Sa part d'enfance à elle.

Dans le premier instant de la première rencontre, j'aime prendre le temps de laisser à l'autre tout l'espace pour épouser l'espace. Tout le silence pour écouter le silence. Dans l'entre-deux, dans l'entre-nous. Et laisser se former la brume de mes pensées qui voudraient déjà tout comprendre. Découvrir alors ce qui se passe à l'intérieur de moi.
Lui, aujourd'hui, parle vite. Parle beaucoup. Et je sens un serrement au creux de mon ventre. Comme une corde qui s'enroule sur elle-même. Pourtant, l'instant d'avant, en marchant dans le parc, j'ai laissé au vent d'automne les pensées qui empêchent la rencontre.
Il parle comme s'il courait après sa parole. La corde dans mon ventre se sert plus fort. Alors je l'interromps : « C'est curieux, inhabituel pour moi, j'ai le ventre noué. » Surprise. Silence. Il pose son regard clair dans mon regard. Puis il dit : « Pour moi, c'est à chaque fois comme ça, face à l'autre. Mais c'est curieux, pas maintenant, pas ici ! »

Le chat choisit l'endroit où le soleil d'automne a posé son dernier rayon. Juste à côté d'elle. Il se pose de tout son long, sur le flanc, les yeux fermés. Le rayon de soleil glisse sur le parquet. Il se retourne sur le dos, commence une danse langoureuse. Comme pour l'enchanter. Il offre son ventre. Alors elle pose son livre, se penche, plonge son visage au creux de son ventre et lui murmure à l'oreille : « Tu es comme une peluche vivante ! ».

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