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MAR 09

L'entre-séance

Que peut faire le coach des idées qui surgissent et foisonnent après une séance : écrire au client ? Les garder pour la fois suivante ?
C'est une demande qui m'est souvent faite en supervision.
Et si la question était plutôt : mais qu'est-ce qui démange le coach, alors ?
Voici l'extrait d'une correspondance avec une coach : une supervision flash, entre deux séances ;-)

« André, Il me vient parfois, après une séance avec un client, des prises de conscience. Mon premier mouvement est alors de partager par mail pour qu'il réfléchisse d'ici la prochaine fois. […]
Je me dis que cela lui permettra d'avancer plus vite. Mais peut-être que je me leurre ?
Alors je viens vers toi pour un éclairage : est-ce intrusif ? Infantilisant ? Est-ce mettre la pression d'intervenir ainsi entre deux séances ? »

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Voici des échos à ta demande que je formule ainsi : Que faire de mon désir de partager les idées qui surgissent après une séance ?
En écho aussi à ton dilemme : écrire à mon client "pour le faire avancer plus vite" mais prendre alors le risque de l'intrusion ou de l'infantilisation ?
Ma position : C'est le client qui fait le travail, pas son coach. Et l'essentiel de ce travail se fait dans l'entre-séance.
Ma proposition : le coach ne revient pas vers le client entre les séances.
C'est effectivement "infantilisant", envahissant ou fusionnel.

Il y a chez en chacun de nous, coach, femme ou homme, une partie "mère nourricière", "bonne mère", qui avec notre bienveillance et nos bonnes intentions peut devenir abusive, castratrice, "mauvaise mère". Cette frontière est ténue. C'est pourquoi Winnicott parle d'une "mère suffisamment bonne" ou "potable"…

Un autre éclairage pour aller au-delà des idées : ce qui chatouille le coach après la séance appartient au client et parfois au coach, selon ses résonances. C'est à détricoter d'abord avec toi-même. Par exemple, comme tu le fais par l'écriture, ici, dans ton courriel : « Je vois ici un problème de conformité à la norme et aussi le complexe d'imposture que je connais bien. »

Une fois identifiée la partie de ce désir (fusionnel ici) qui t'appartient, je t'invite à regarder comment ton client suscite, réveille cette envie ? Et comment cet élan se joue aussi et se rejoue pendant la séance ? C'est un matériau de travail bien vivant que je t'invite à nommer et utiliser, au fil de l'eau, avec ton client.

Dit autrement : le client "met en dépôt" chez nous, une partie de lui-même qu'il méconnaît ou n'assume pas et à laquelle nous "vibrons". Notre rôle du coach est de lui restituer, de faire circuler cela…

En effet, l'important pour l'hygiène du coach et l'autonomie du client, est de recycler le plus possible ce matériau en séance.
Ce travail va au-delà du contenu (« conformité à la norme, imposture ») : il s'agit de se centrer sur le processus qui te relie au client, sur la relation. Les psys parlent ici de transfert et contre-transfert.

André