J'aime écrire sur l'intimité, celle du coach, celle du client dans la relation de coaching...
Mais comment définir l'intimité ?
J'ai trouvé une belle réponse, ce matin, dans un livre de Willy PASINI : "Eloge de l'intimité".
« Comme le chant des sirènes pour les marins d'Ulysse, l'intimité suscite un désir profond et viscéral, auquel personne ne souhaite renoncer. En même temps, l'intimité partagée exige le dépassement de peurs archaïques, telle la peur de la fusion-confusion, la peur d'être découvert, celle de s'abandonner à cette drogue affective à la fois attirante et dangereuse.
L'intimité "saine" implique au contraire une forte autonomie individuelle qui précède la confiance partagée. Accéder à l'intimité signifie se mettre dans la peau de l'autre sans perdre sa propre intimité. Cela signifie aussi la réception de l'autre dans son propre territoire intime sans se sentir envahi ou contaminé. »
Pasini montre aussi que les hommes ont peur de s'abandonner à l'intimité. Et pourtant « ses besoins d'intimité sont plus grands que ceux de la femme. Mais il les camoufle derrière des exigences avouables sur le plan social. […] Il se ferme comme un hérisson : n'avoir besoin de personne devient une tentative désespérée pour nier son besoin profond d'intimité. »
Et je prépare un livre sur ce thème qui paraîtra chez Démos début 2008 : "Dans l'intimité du coaching"
Voici, en primeur, un des premiers chapitres...
« Je ne sais pas ce qu'est le féminin.
Mais ce que je sais avec vigueur, c'est qu'il fait toute la différence.
Le secret de la vie c'est la différence. »
Christiane SINGER
L'entreprise est une scène où se rejouent les clivages entre hommes et femmes. Avec parfois une véritable "guerre de tribus" ! Comment "enterrer la hache de guerre", dépasser ces oppositions, relier les contraires ?
La relation de coaching est une formidable chambre d'écho : le client reproduit avec son coach les projections implicites, les jeux transférentiels et les oppositions qui animent l'entreprise. Cette relation peut alors devenir le lieu d'apprentissage de nouvelles alliances…
Partons à la rencontre d'Annabelle dont le roman personnel et les objectifs professionnels s'entrechoquent.
Annabelle est la directrice juridique d'un groupe pharmaceutique ; en poste depuis une dizaine d'années dans l'entreprise, elle cherche aujourd'hui à prendre de nouvelles responsabilités dans le groupe, mais ses tentatives semblent buter sur "des obstacles incompréhensibles".
Elle a demandé un coaching au DRH qui lui a présenté deux coachs, un homme et une femme. Annabelle a choisit l'homme…
C'est notre deuxième séance ; Annabelle l'ouvre très directement :
- Rien de vraiment nouveau depuis notre séance... Mais la dernière fois, il s'est passé quelque chose qui m'a beaucoup interpellée. J'aimerais comprendre, mais sans trop savoir comment vous en parler ?
- Vous avez déjà commencé...
- Oui, en effet ! C'est quand vous avez dessiné ma relation avec Sandra, ma N+2, et ce que vous nommez une "alliance illégitime" quand je court-circuite mon hiérarchique direct...
Annabelle s'interrompt, hésite… Je l'encourage :
- Oui, c'était à la fin de notre séance...
- Je me suis alors rapproché du dessin… J'ai ajouté mon N+1 et représenté la relation avec des pointillés... Nous étions alors, vous et moi, côte à côte... A cet instant, vous avez eu comme un sursaut ! Puis un mouvement de recul !!
- Je me souviens bien de notre dessin à quatre mains. Et pas encore de mon sursaut…
Annabelle se met brusquement en retrait :
- Je suis désolée, je n'étais pas sûre de vous reparler de tout ça aujourd'hui !
- Parfois, mon corps exprime ce que je ne sais pas encore... Peut-être, un peu comme vous, à l'instant ?
Suit un très long silence…
Lors de notre première séance, Annabelle m'a exprimé sa difficulté de "se protéger des hommes, fuir leur voisinage jugé toujours risqué et dangereux". Et pourtant, ce qu'Annabelle redoute le plus semble se produire à chaque rencontre : "des relations toujours ambiguës avec l'autre moitié du monde"...
J'étais moi-même mal à l'aise ; et je ne me sentais pas prêt à utiliser notre relation comme outil de travail. J'ai alors recentré le coaching sur l'objectif d'Annabelle : ses relations avec son entourage professionnel.
De nouveau, ici, Annabelle semble me ramener dans son histoire. Je replonge alors dans notre séance passée.
- Je me demande ce qui a bien pu me faire reculer, il y a un mois ?
- Voulez-vous partager ce qui se passe pour vous ?
Nous avons terminé la séance en prenant du temps ; le temps pour Annabelle de mettre des mots sur le poids de "loyautés jusqu'alors invisibles", sur notre relation complémentaire et créatrice, sur nos frontières aussi… Puis Annabelle a formulé l'envie de regarder autrement son N+1 :