« Ça, c'est l'une des formes du transfert » tente-t-il d'expliquer. Long silence. Alors il croit bon d'ajouter : « Et vous me payez pour gérer ça : pour ne pas tomber amoureux de vous ! » Elle se met en colère. Il essaie autre chose : « C'est peut-être de votre désir dont vous avez peur ? » Il entend ses sanglots. Alors, plutôt que continuer là maintenant, avec lui, il l'invite à chercher de quelle part d'elle-même elle est tombée amoureuse. Et de choisir de revenir ou pas.
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Il s'assied en face de moi, bien droit sur le bord du fauteuil. Le regard sombre, la mâchoire serrée. L'air est à couper au couteau soudain.
Je prends une longue inspiration et demande : « Avec quoi venez-vous aujourd'hui ? » Il répond du tac au tac : « J'ai envie de tout exploser ! De vous confronter à vos failles ! » Je sais alors que la séance sera comme un combat, un combat non sanglant. Et que lui a rendez-vous avec son ange.
Pour lâcher ce qui ne m'appartient pas et que je prends encore à cœur en séance, celle qui, sans un mot, d'une pression des doigts ou de la paume de ses mains, sait dénouer peu à peu des mémoires anciennes, cette femme aux yeux de biche me suggère d'aller nager le soir. La piscine est fermée ; alors, en rentrant, j'aime prendre le temps d'un détour en forêt sous les averses de l'automne.
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