Facebook c'est mon carnet d'esquisses pour vagabonder tout en associations libres, au jardin ou après les séances. Et Timehop c'est une appli sur smartphone qui fait des sauts dans le passé, qui remonte le fil du temps, une, deux, trois et même quatre années avant ; une appli toute simple qui fourrage au fil de mes posts, ici et là, sur le mur bleu, Twitter ou Instagram, et qui propose au petit matin des instants saugrenus ou des photos oubliées, des haïkus imparfaits et délicieux.
J'aime bien Timehop parce que c'est comme une paille dans un mojito et ça m'évoque aussi le travail de haute couture qui se déroule sur le divan, mine de rien et dans le feuilleté de l'âme : laisser surgir des affaires pas classées ou des souvenirs enfouis, des fragments de mémoire ou des légendes insensées, et puis alors pouvoir retisser un peu mon histoire et plein d'anti-histoires.
Et là, en partage, quelques perles de mémoire…
La libellule en bord de mare elle aime bien faire l'hélicoptère. Mais ton chat nippon il aime vraiment pas les hélicoptères ; peut-être que ça lui rappelle le Vietnam au fond. Alors là, au bord du jardin d'eau, c'est un vrai champ de bataille.
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- Si vous partez sur la lune, qu'est-ce que vous emmenez ?
Il nous raconte ce jour où un coach lui a demandé ça à lui et à son équipe.
Et lui alors, il a répondu :
- Un fusil.
- ... ?!?
- Oui, parce que très vite, je sais qu'on finit toujours par s'entre-tuer, il ajoute.
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Coach au talent vraiment singulier, elle a aussi l'une des formes aiguës des troubles de l'attachement. Elle aime murmurer sa peine et puis elle lâche là, tout à trac : « Chaque nouvelle rencontre, chaque séance me fait tant souffrir que j'ai parfois l'envie d'abandonner ce métier à jamais. » « Et vous, ajoute-elle, ça vous prend aussi parfois cette mélancolie, cette envie d'aller garder des moutons ou des chèvres ? »
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Elle me raconte qu'elle a aimé traverser le pays des caribous en ULM ; et puis, de là-haut, elle a bien vu que la terre n'avait pas vraiment besoin des hommes.
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Elle pose l'argent là, sur la table basse et de verre. Et puis elle se lève et me lâche : Vous avez vu, je ne mets plus d'enveloppe ! Et elle me regarde comme si c’était une question. Je me souviens qu'une fois il manquait un billet dans la petite enveloppe en vélin qu'elle prenait toujours soin de préparer avec mes initiales dessus.
- À quoi ça vous servait cette enveloppe-là au fond ? je lui demande.
- C'est cru de poser l'argent ainsi, je trouve.
- C'est cru
- Oui, c'est le sexe tarifé qui se paie ainsi... Et puis la psychanalyse !
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Quand il rate le hamac, le chat ne retombe pas sur ses pates, hélas.
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En photo : Hé Ros, le chat nippon, le chat d'Eva.