C'est au square que j'ai aimé préparer la dernière séance de supervision à Paris 2 pour le Master Coaching. Oui, sur le thème de la séparation puisque c'était la fin.
Les années d'avant, je proposais de tricoter le fil existentiel de la finitude, une maille à l'endroit, une maille à l'envers : l'incontournable perte ou disparition de toute chose, l'angoisse plus ou moins consciente qui l'accompagne, et nos stratagèmes intimes pour l'ignorer ou la défier. Mais ça, c'était avant. Aujourd'hui, je préfère travailler "autour de". C'est sur le divan que j'ai appris ça, dans mes traversées sur les chemins de l'inconscient.
Et donc, au square, quelques jours avant la séance, j'ai observé un enfant découvrir des pigeons, essayer de les attraper et, en même temps, hurler « OUASOO… OUASOO », une manière de symboliser ainsi.
Et j'ai l'impression – mais sans doute ai-je projeté –, qu'il voulait non pas les attraper mais les étriper les pigeons. "Ne touche pas ! C'est sale !" lui lançait sa mère. Et moi, je montrais à l'enfant comment, avec des miettes de pain, les attirer un peu.
Tout ça m'a fait penser au jeu de la bobine, ce jeu que Freud observa chez son petit fils, Ernst, et qu'il décrit dans "Au-delà du principe de plaisir" : le "Fort/Da".
Freud vit jouer l'enfant avec une bobine en bois entourée d'une ficelle. Il jetait la bobine par-dessus son lit, elle disparaissait, tout en s’écriant « o-o-o-o » qui est l'ébauche du mot « fort » (« loin » en allemand) ; puis l'enfant tirait sur la ficelle pour faire réapparaître la bobine et la ramenait à lui en s'exclamant « Da ! » (« là »).
Freud relie ce jeu à la situation de l'enfant à cette période : quand sa mère s'absentait pendant de longues heures. Le jeu symboliserait ainsi la disparition et la réapparition de la mère.
Et le jeu serait similaire à un espace psychique dans lequel l'enfant peut faire le lien entre présence et absence, dedans et dehors, lui et les autres… Dans cet espace qui apprivoise le manque, il ne se pose pas la question du vrai ou du faux, et plonge dans un univers singulier entre le réel et l'imaginaire où il peut déplacer, représenter, jouer ses émotions : c’est l'univers symbolique.
Pour Freud, la psyché de l'enfant va se construire sur ce prototype de la maîtrise de la présence-absence (de la mère, du corps).
Et j'ai aussi proposé un atelier sur tout le contraire de la séparation : les dépendances et les addictions.
Et puis encore, pour ceux qui le voulaient, un autre atelier pour tenter d'approcher et puis analyser le transfert qui s'était tissé, avec moi, au fil de l'année.
Trois ateliers en parallèle donc, et séparés. Et c'était bien.
En partage, ici, mes notes pour cette dernière séance.
Master 2 - Paris 2 - Supervision en groupe
Séance 8 - 16 juin 2017
SÉPARATION, DÉPENDANCE & TRANSFERT
1. INTRODUCTION
C'est la dernière séance. Ça nous plonge d'emblée dans la question de LA FIN. Avec de multiples facettes alors. Par ex8emple, la question de la séparation posée par Virginie. J'y reviendrais tout à l'heure.
Les années d'avant, ici, pour ce fil de séances, j'aimais focaliser toujours et surtout sur un versant existentiel : la finitude. L'une des données fondamentales de notre humaine nature avec d'autres contraintes existentielles : la Solitude, l'Imperfection, l'Absurde et la Responsabilité.
Autant de sources d'angoisse profonde et plus ou moins conscientes. Et avec alors de multiples stratégies ou défenses pour contourner cela. Pour la finitude : hyperactivité ou déni, transgression ou conduites ordaliques…
« Le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face ». La Rochefoucault.
Ce soir, je vous propose plutôt de "travailler autour" de la fin, dans ses différentes facettes.
Nous sommes des êtres de lien, des êtres parlant, et la fin, sur le fil du lien et sur le fil de l'inconscient, ça interroge le TRANSFERT.
En coaching, la fin est fixée à l'avance, programmée : selon le nombre de séances, le budget, la "technologie" (le coaching "bref" par exemple). Même si ça se sait d'avance ça tombe quand même comme un couperet sur le fil psychique. Ou comme une limite peut-être qui permet de ne pas trop s'engager ?
En psychanalyse, ça s'élabore. Sinon il reste une attache psychique bien plus tenace que la séparation de corps.
Et donc ce soir pour ceux qui le veulent, prendre ce temps-là avec moi, enfin pour ceux avec qui s'est tissé un fil singulier, de part et d'autre. Transfert et analyse du transfert, en présence.
En préparant cette séance, d'autres facettes autour de la fin me sont venues :
La DÉPENDANCE, l'attachement. Tout à l'opposé. Oui, c'est intéressant, je trouve, de regarder tout le contraire de l'état séparé.
La faim ! Nos addictions singulières ou multiples.
Recherche d'une jouissance initiale et perdue. Pour une jouissance illimitée avec un objet plus ou moins choisi.
Quels objets nous choisissons pour nourrir ce besoin-là ?
A l'origine :
Le "fort da" ou l'enfant, le jeu de la bobine et la mère.
ERNST le petit-fils de Freud. Présence/absence de la mère. L'apprentissage premier de la séparation, par la symbolisation, le langage. « Pulsion de maîtrise ».
Répétition et déplaisir.
Autre facette dans ce jeu-là : la mère est aussi la femme de l'autre, du père… « pulsion de vengeance »
Un atelier Addictions & dépendances donc. Mais pas forcément sur le mode "groupe de parole" genre "Alcooliques anonymes". Non, – enfin, ça peut être ça –, mais aussi analytique/analysant : Pourquoi cet objet-là ? Et puis sur le fil des analogies entre vous, toujours.
Et puis enfin le thème de la SÉPARATION.
Séparation physique versus psychique. Attachement & Arrachement !
Nos séparations singulières. Voyage en libre association. Ça m'évoque quoi. C'était quand ? C'était qui ? Pourquoi je me sépare ? De quoi je me sépare ? Qu'est-ce qui reste ?
Donc trois ateliers séparés ce soir : thématiques et en liberté. Et attachés aussi mais, un peu différemment. Différenciation. Prendre une place nouvelle, différente. Individuation.
Et ce sera ainsi une première pour la dernière.
2. LES TROIS ATELIERS
Nos dépendances
Nos séparations singulières
Transfert et analyse du transfert
3. RETOUR EN PLÉNIÈRE
Et fin.