C'est aussi au jardin que j'apprends mon métier : un haut lieu où s'exprime le vivant sous ses formes, infiniment changeantes, créatives, poétiques, exubérantes, imprévisibles…
Un lieu où j'apprends que, malgré tout le soin apporté, certaines créations végètent ou meurent.

Voici un ex-futur article. Ce texte, commandé par un magazine économique pour un projet de chronique mensuelle "Conseils de coach", n'a finalement pas vécu. Après de nombreux allers-retours, puis le regard critique de mon coach littéraire et encore d'autres ajustements, j'ai proposé au journaliste de renoncer. Un article peut-être trop conseil, trop coach, un cocktail improbable. Une autre manière d'écrire que j'ai aimée expérimenter et que je partage ici.

« Mon patron ne m'inspire plus ! »

Cyril dirige un centre de profit d'un groupe en forte croissance dans les télécoms. Il a 32 ans et s'interroge : « Les dirigeants que j'ai côtoyés étaient jusqu'alors une source d'inspiration et d'apprentissage. Mais aujourd'hui, cette source se tarit. Alors je change plus souvent d'entreprise avec l'envie de retrouver d'autres leaders, porteurs de sens, charismatiques, qui suscitent ma créativité, qui m'initient encore. Mais en vain ! Alors que faire ? »

Décodages de coach :

Le besoin de repères extérieurs : Comme le jeune adulte qui se construit, Cyril a encore besoin de s'appuyer sur des figures emblématiques qui lui apportent des repères ou le nourrissent : figures de puissance, d'autorité, d'expertise… Les dirigeants "charismatiques" sont ces modèles qui, par leurs idées, leur manière d'être ou de faire, inspirent les jeunes managers.
Sur la scène politique aussi, certains leaders, porteurs d'une vision novatrice, sont parfois une source d'inspiration singulière en matière de gouvernance.

Projections : Chacun de nous projette sur les autres son imaginaire et ses envies. Ainsi, Cyril perçoit chez ses mentors des qualités qui lui appartiennent aussi. Et, s'il n'est plus inspiré, ses maîtres n'ont pas forcément perdu de leur charisme. Cela indique simplement que Cyril termine un cycle d'apprentissage et que ses sources d'inspiration sont maintenant d'une autre nature.

Retour aux sources : Pour cesser la fuite en avant, c'est en lui-même que le jeune dirigeant doit trouver des repères et du sens. Une autre manière de se développer s'ouvre alors pour Cyril : se confronter à soi, à ses forces et à ses propres repères. Mais cette responsabilité de soi réveille des pressions existentielles qui sont aussi sources de doute : la solitude du dirigeant, l'imperfection, l'absence de sens... Il s'agit pourtant d'oser revenir à la source pour découvrir et construire sa singularité de dirigeant.

Quelques "conseils" :

Pour sortir de l'ombre de ses mentors et assumer l'idée qu'il est désormais sa propre source d'inspiration, un jeune dirigeant comme Cyril peut :
Apprendre à intégrer ses ombres : nos ombres sont des qualités personnelles que nous n'osons pas assumer et que nous projetons sur des figures érigées comme modèles. Ainsi, Cyril en évoquant des leaders qui l'inspirent, parle aussi de ses qualités en devenir : charisme, créativité… Ce mécanisme joue aussi en négatif : nous attribuons à d'autres nos imperfections, nos limites personnelles ! Aller à la rencontre de ses ombres est un travail sur soi continu et confrontant. En l'entreprenant, Cyril découvrira des ressources personnelles dont il ne soupçonnait ni l'existence ni la valeur.

Cultiver les relations qui ressourcent : être leader de soi n'est pas s'enfermer dans un modèle autocentré et narcissique ! Ce sont les rencontres avec les autres, la confrontation avec leurs différences qui sont sources de développement. C'est aussi cultiver son réseau, prendre le temps de rencontrer des professionnels d'univers différents qui apportent ainsi un regard décalé. Etre attentif, en chaque occasion, à la qualité de la rencontre plutôt que privilégier la quantité des contacts.

Cultiver les échanges avec ses pairs : clubs de dirigeants, universités d'été, cercles de réflexion éthiques ou philosophiques... autant d'espaces qui contribuent à développer son appartenance et sa singularité.

Agir dans la cité : en s'investissant dans la politique locale ou dans d'autres sphères que l'entreprise, Cyril découvrira sa capacité d'influence et aussi ses  limites. C'est une autre manière de trouver du sens dans l'action et avec les autres. C'est aussi une manière d'asseoir sa confiance en soi et d'obtenir une reconnaissance utilisable dans l'entreprise.

Mieux se connaître, s'enrichir de l'expérience et de la sensibilité des autres et s'engager humainement dans son environnement sont autant de manières de cultiver son identité tant personnelle que professionnelle.