« Où sont vos pensées, Myrna ?
- Je pense que je suis piégée. Je pense à partir en Alaska où la proportion entre le nombre d'hommes et de femmes est plus favorable. Ou à faire une école de commerce - la proportion est bonne, là aussi.
- Restez ici dans la pièce avec moi, Myrna. Qu'est-ce que ça vous fait d'être là, aujourd'hui ?
- Qu'est-ce que vous voulez dire ?
- La même chose que d'habitude. Essayez de parler de ce qui se passe ici, entre nous.
- C'est frustrant ! Encore cent cinquante dollars d'envolés et je ne me sens pas mieux.
- J'ai donc à nouveau échoué aujourd'hui. Je vous ai pris votre argent sans vous aider. Dites-moi un peu, Myrna ; voyons si, en revenant sur cette heure que nous venons de passer, vous pourriez répondre à cette question : Qu'aurais-je pu faire aujourd'hui ?
- Comment le saurai-je ? C'est pour ça qu'on vous paye, non ? Et de jolies sommes !
- Je sais que vous ne le savez pas, Myrna, mais je veux que vous plongiez dans votre imagination. En quoi aurais-je pu vous aider aujourd'hui ?
- Vous auriez pu me présenter à un de vos patients riche et célibataire.
- Est-ce qu'il y a marqué "Agence matrimoniale" sur mon T-shirt ? »
C'est par ce dialogue que commence Double exposition, l'un des six contes de psychothérapie du livre d'Irvin Yalom publié cet été chez Galaade Editions : La malédiction du chat hongrois.
Après un acte manqué du docteur Yalom, alias Ernest Lash, Myrna le mettra à la torture. Elle lui fera vivre « son pire cauchemar de thérapeute », le poussera aux limites de sa pratique en jouant avec son contre-transfert, en allant pleinement dans l'ici et maintenant…
Il arrive à l'heure d'habitude et aujourd'hui, il sonne avec dix minutes de retard. J'ouvre la porte et je vois qu'il a couru. Il a le souffle court. Sa chemise blanche est froissée sous son costume bleu marine impeccable.
Son bureau est à quelques stations de métro et il préfère venir à pied. Il m'annonce : « Je crois que j'ai battu mon record aujourd'hui ! ».
Il m'explique qu'il n'a pas réussi à maîtriser sa réunion, juste avant…
Je l'entends sans vraiment écouter et l'invite à prendre le temps d'arriver. Des gouttes de sueur perlent sur son front jusqu'aux sourcils. Il tente de s'essuyer avec ses doigts, ses mains. Je lui tends la boite de kleenex. Il retire sa veste, se pose enfin. Regards. Long silence après l'agitation.
Charles est directeur du contrôle de gestion dans une entreprise leader dans les télécoms. Régulièrement sollicité par des chasseurs de tête, il change d'entreprise tous les deux ou trois ans. Il pratique aussi des sports de l'extrême. Comme s'il courrait après lui-même ?
Mais aujourd'hui, devant une nouvelle offre séduisante, il hésite : « Pourquoi partir encore ? Pourquoi cette boulimie du changement ? »
C'est sa demande pour ce coaching. Comment l'accompagner dans ce questionnement ? Est-ce vraiment le champ du coaching ?